02 fév 2012
Bienvenue
Bienvenue sur le blog du Sénat consacré à l’application de la loi pénitentiaire. Créé par la commission sénatoriale pour le contrôle de l’application des lois, il a vocation à donner la parole aux citoyens confrontés quotidiennement aux réalités de l’application des lois.
En veillant à la mise en œuvre effective des textes votés par le Parlement, la commission sénatoriale souhaite examiner en profondeur les retards, lacunes et difficultés de toute nature qui sont actuellement autant d’obstacles à l’application réelle des textes législatifs.
La parole est maintenant à vous, n’hésitez pas à vous en saisir !
Voici quelques petites réflexions sur la Loi du 24 novembre 2009.
La PSAP (art 723-20 CPP) et la SEFIP (art 723-28 CPP) conduisent à une sorte de “course à l’échalote” entre le SPIP et le JAP au détriment du condamné. Petites anecdotes.
La SEFIP, tout d’abord : un jour, je reçois un appel d’une CPIP m’indiquant qu’une personne en SEFIP est en grande difficulté et que je dois rapidement l’admettre au bénéfice de la libération conditionnelle. En effet, cet homme a été victime d’un problème cardiaque en détention, a été hospitalisé à FRESNES mais n’a pas voulu y rester parce qu’il n’y recevait plus les visites de sa fille aînée. Le SPIP lui propose une SEFIP lui expliquant qu’il sortirait plus vite. Il accepte. Or, sa situation administrative est complexe et il n’a pas de couverture maladie. Il ne peut donc plus acheter son traitement. C’est le médecin de l’UCSA qui a dû le dépanner. Il ne peut sortir que quelques heures par jour. Dans ces conditions, il ne peut pas travailler. Tant est si bien qu’il n’a plus de quoi se nourrir et que son fils de 14 ans doit lui apporter à manger, à la sortir du collège, et lui donne la nourriture qu’il prend dans le réfrigérateur de sa mère. A cela s’ajoute une difficulté juridique : si une requête devant le JAP a été déposée, une SEFIP est impossible (art D 147-30-21 CPP). Or, dans le dossier de cette personne, il y a une requête en aménagement de peine saisissant le JAP antérieure à la SEFIP et aucune trace d’un quelconque désistement. En clair, on demande au JAP de démêler en urgence une situation qui a été aggravée, étant précisé que le JAP n’a jamais eu connaissance de la SEFIP alors que tout cela était juridiquement impossible…
S’agissant de la PSAP, le JAP qui refuse une homologation est vu comme un empêcheur de tourner en rond. Dans ma juridiction, elle est surtout utilisée pour les libérations conditionnelles “expulsion” (art. 729-2 CPP). Souvent, il y a déjà eu une requête en ce sens déposée devant le JAP. Devant le JAP, la personne a le droit à un avocat et à un interprète. Avec une PSAP, pas d’interprète ni d’avocat. Pourtant, dans le dossier de PSAP transmis pour homologation au JAP, il y a un PV écrit en français selon lequel la personne accepte une telle procédure. Comme ce PV a-t-il a été dressé ? Quid de l’interprète ? Récemment, j’ai refusé d’homologuer une PSAP proposant d’expulser une homme en Guinée-Bissau au motif qu’il a une femme et 4 enfants installés au Portugal, qu’il n’a pas remis les pieds dans son pays d’origine depuis 24 ans et que c’est dans son pays d’adoption qu’il envisage de créer une entreprise. J’ai en outre relevé le problème du PV relaté plus haut. Le SPIP n’a pas vraiment apprécié… C’est sans compter les détenus qui expliquent que si leur dossier est incomplet c’est pour que le JAP rejette leur requête et que le SPIP puisse mettre en oeuvre une PSAP…
En ce qui concerne les permissions de sortir prévues pour l’exercice du droit de vote, une seule demande. C’est peu ! Est-ce que l’information est bien transmise aux détenus ?
La possibilité d’admettre en semi-liberté, placement extérieur ou placement sous surveillance électronique un an avant la date d’admissibilité à la libération conditionnelle a généré une surpopulation dans les centres de semi-liberté tant et si bien que l’on ne peut plus en prononcer faute de place disponible. Par ailleurs, la loi du 10 août 2011 revient en grande partie sur ces dispositions concernant les longues peines. Pourquoi ?
Les dispositions relatives au travail en détention sont encore trop timides. Pas de véritable contrat de travail, de protection en cas d’accident…
La loi pénitentiaire crée une sorte d’”obligation d’activité”. Aujourd’hui, la situation est toujours catastrophique. Il faut attendre plusieurs mois pour espérer travailler, suivre une formation… Certains détenus sont même incités à ne plus faire de demande parce qu’on leur dit que leur peine est trop courte. Est-ce à dire qu’il faut alourdir la peine pour que la personne ne passe pas 22 heures sur 24 en cellule ? Le système devient absurde !!! Dans de telles conditions, l’octroi de réductions de peine supplémentaires perd tout son sens.
Si des efforts ont été faits pour faciliter l’admission au bénéfice de la suspension de peine pour raisons médicales (art 721-1-1 CPP) en permettant en cas d’urgence de se dispenser des 2 expertises concordantes mais à condition d’avoir un certificat médical constatant que le pronostic vital est engagé à court terme ou que l’état de santé de la personne est durablement incompatible avec la détention, le dispositif est encore perfectible. Ainsi, lorsque l’octroi de la SPM relève de la compétence du TAP, il n’y a pas de possibilité de statuer en urgence, hors débat, au visa de l’article 712-8 du CPP. En cas de condamnation pour des faits de nature criminelle, le JAP doit demander une expertise tout les 6 mois. En dehors de la charge de travail que cela représente et des difficultés pour trouver un expert, certains condamnés ne prennent plus leur traitement à l’approche de l’expertise… Si faire en sorte qu’une personne meurt entourée des siens est un grand progrès, une amélioration de l’état de santé n’est pas considérée comme une bonne nouvelle mais comme annonciatrice d’un retour en détention. De plus, la maladie psychiatrique n’est pas prise en compte correctement. La SPM est impossible si elle a pour but de permettre une hospitalisation en hôpital psychiatrique. Enfin, demeure le problème crucial du lieu d’hébergement.
Si la SPM est possible quelque soit le quantum restant à exécuter, la libération conditionnelle pour les personnes âgées de plus de 70 ans ne semble peut-être pas suivre le même régime. En effet, la période de sûreté peut y faire obstacle.
Je reste à votre disposition pour tout renseignement complémentaire et pour poursuivre l’échange.
Merci à vous de vous investir sur ce sujet.