Agnès Van Zanten, chargée de recherche à l’observatoire sociologique du changement (Sciences Po/CNRS) a rappelé devant les sénateurs de la mission le fondement même de la légitimité de la mise en place d’une carte scolaire en France : la fourniture d’une offre éducative homogène sur tout le territoire.
Si chaque élève, quel que soit son lieu d’habitation, a un accès à une formation équivalente alors la sectorisation a un sens. A l’inverse, ce n’est que si l’offre est diversifiée, qu’une politique du libre choix peut apparaître comme plus pertinente. Seulement aujourd’hui, l’école publique française se caractérise non par la diversification pédagogique, mais par la hiérarchisation des établissements, par la différenciation entre les « bons » et les « mauvais ». Dans ce contexte, une désectorisation a des conséquences extrêmement négatives pour les établissements et élèves les plus en difficulté.
Face à ces difficultés, l’évitement n’est pas toujours l’option retenue par les parents lorsque ces derniers font le choix, par exemple, de s’investir dans la vie scolaire. Avec une équipe pédagogique stable et un environnement urbain pas trop dégradé, le maintien, en particulier des classes moyennes, au sein de l’établissement donne des résultats positifs.
Mais cette participation prend un visage moins vertueux lorsqu’elle vise à maintenir des scolarités séparées à l’intérieur même des établissements. Les options construisant des parcours spécifiques s’inscrivent contre les objectifs d’hétérogénéité et de mixité, conditions jugées nécessaires pour favoriser la qualité du climat scolaire et des apprentissages. L’homogénéité est pédagogique néfaste notamment parce que les enseignants ont tendance à abaisser leur niveau d’exigence lorsque le niveau scolaire est très faible.
Le point essentiel est qu’il ne faut pas confondre simple mélange statistique des élèves et mixité sociale ; la mixité sociale nécessite une véritable construction politique et pédagogique, ce qui est souvent négligé dans notre pays.
Par ailleurs, l’usage de la dérogation nécessite de savoir rédiger une demande motivée, de connaître les parcours de formation. Seuls les initiés peuvent les décrypter. Une partie, toujours la même, reste exclue de cet assouplissement de la carte scolaire.
En ce qui concerne l’inscription dans un établissement privé, celle-ci ne repose plus à titre principal sur des critères idéologiques, mais représente plus un recours si la scolarité se passe mal dans le public. Ces derniers proposant une offre plus diversifiée et sélectionnant leurs élèves, ils sont donc plus attractifs dans un système dérèglementé comme on l’a vu précédemment. Un constat : le privé accueille aujourd’hui en moyenne une très faible fraction d’enfants de parents d’immigrés.
Plus généralement, les parents ne croient pas ou plus en la capacité de l’école à lutter contre les déterminismes sociaux. L’évitement est le plus souvent lié aux effets de réputation, mais leur choix ne dépend plus du discours politique ou de l’institution scolaire elle-même auquel ils n’accordent plus confiance.
Pourquoi un tel fossé ? Parce que le climat anxiogène lié à des évaluations négatives répétées de notre système d’enseignement n’a donné lieu à aucune piste d’amélioration.
Notre responsabilité est plus que jamais engagée.
FLORET // 27 fév 2012 à 6:56
Si la suppression de la carte scolaire n’a pas eu les effets escomptés (mais peut-on parler effet sur une si courte durée et pour un sujet de très long terme), l’existence de la carte scolaire n’a pas eu plus d’effets. Elle entraîne a contrario une spécialisation des territoires par effet de migration des populations les plus aisées.
Par ailleurs, peut-on me donner le nom d’un pays européen ayant une carte scolaire autre que la France? En particulier un des pays trônant dans les premières places de la carte OCDE. Mais peut-être, comme toujours, la France se croit hors des champs de comparaison…
BALLU-BRTHELLEMY // 27 fév 2012 à 10:11
Après un tel constat, relevons le défi en instaurant un climat serein en redonnant ses lettres de noblesse à notre sytème d’enseignement. Cherchons les pistes d’amélioration qui permettent de combler les fossés creusés ces dernières années. Il est plus que temps !!!!!