La semaine prochaine, le 25 mai, aura lieu à Washington un séminaire américano-italo-français sur les recherches réalisées aux pôles Nord et Sud.

Il est organisé par les ambassades de France et d’Italie avec l’appui des instituts polaires américains, italiens et français.

Seront réunis un échantillon des grands spécialistes des trois pays et j’espère pouvoir apprendre énormément à travers les exposés et les différentes rencontres.

Je dois intervenir au cours de ce séminaire pour présenter la démarche de l’Office parlementaire. Je m’exprimerai également sur la nécessité de la coopération internationale dont Concordia est un symbole. Je terminerai mon propos par la présentation de la station avant la liaison directe avec les hivernants de la station.

Vous trouverez ci-joint mon projet de discours. Qu’en pensez-vous ?

Monsieur l’ambassadeur d’Italie, son excellence Giovanni Castellaneta,
Messieurs les directeurs des programmes polaires italiens, américains et français,
Madame et Messieurs les professeurs d’université et éminents chercheurs,
Mesdames, Messieurs,

C’est pour moi un très grand honneur de m’adresser à vous aujourd’hui au cours de ce séminaire permettant, l’espace d’une journée, d’avoir un aperçu de la très grande diversité, de la très grande richesse et de la très grande nécessité des recherches menées aux pôles.

Je tiens en premier lieu à remercier très chaleureusement, son excellence Giovanni Castellaneta, ambassadeur d’Italie, d’accueillir dans son ambassade cette manifestation. Je tiens également, au nom du Parlement français, à le féliciter de sa récente nomination dans l’ordre de la légion d’honneur, la plus importante décoration française. Elle est le signe de son action personnelle en faveur de notre pays et de l’amitié entre nos deux peuples.

Je souhaite également remercier les services scientifiques des ambassades d’Italie et de France ainsi que le Bureau pour les programmes polaires de la Fondation américaine pour la science, sans qui cette journée n’aurait pu être organisée.
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Je souhaite aborder devant vous trois sujets : ma mission en tant que parlementaire, homme politique, au sujet de la recherche en milieu polaire, la coopération internationale et enfin, présenter ma vision de la station franco-italienne Concordia.
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Avant de devenir parlementaire, j’étais moi même ingénieur, chercheur et professeur à l’êcole Centrale dans le domaine de l’automatique. C’est donc tout naturellement que lors de mon élection au Sénat, j’ai demandé à siéger à l’Office parlementaire d’évaluation des choix scientifiques et technologiques.
Cet Office, qui n’existe je crois ni aux êtats-Unis, ni en Italie, réunit des parlementaires, députés et sénateurs, dont la mission est d’étudier des questions scientifiques ou techniques pour informer l’ensemble du Parlement et l’opinion publique afin que les décisions et les lois soient votées sur des bases objectives et cohérentes avec l’état de la science.
Nous entretenons donc un dialogue suivi et approfondi avec l’ensemble de la communauté scientifique française et même internationale. Nous travaillons avec les académies et les grands instituts de recherche comme le Centre national pour la recherche scientifique, le CNRS, mais aussi c’est une évidence avec les unités de recherche des universités.
L’un des exemples de ce dialogue sont les trinômes mis en place chaque année entre un parlementaire, un académicien et un directeur de recherche pour que les uns et les autres puissent mieux se comprendre et dialoguer, les scientifiques venant au parlement et dans nos régions et les parlementaires allant dans les laboratoires.
L’Office a donc publié depuis sa création au début des années 1980 un grand nombre de travaux qui ont fait autorité, notamment sur les questions liées à l’énergie, au changement climatique et au développement durable.

C’est donc dans ce cadre, que j’ai été désigné par mes collègues pour mener une étude sur les enjeux de la recherche en milieu polaire.
A la veille de l’année polaire internationale, les recherches menées aux pôles sont au centre de nombreux enjeux majeurs pour nos sociétés et sources d’informations précieuses pour prendre des décisions politiques dans les années à venir. Je pense tout particulièrement aux recherches sur la compréhension des climats. Le rôle de la paléoclimatologie est absolument fondamental pour vérifier les modèles climatologiques et démontrer la réalité de l’action de l’homme. C’est bien cette démonstration scientifique qui provoque l’action des différents pays.
De même les sciences de la vie, à travers certaines espèces particulièrement emblématiques nous démontrent à chaque instant le rôle de sentinelle de ces espèces et des régions polaires pour le changement climatique et la préservation de la diversité biologique.
Ces recherches, et je n’ai pris là que deux exemples, sont donc des recherches « politiques » au sens noble du terme, c’est à dire qu’elles intéressent directement les citoyens et qu’elles ont un impact sur la vie de la cité.
Enfin, la France a vis-à-vis de l’Antarctique, tout particulièrement de la Terre Adélie, une responsabilité particulière y ayant débarqué dès 1840 et y étant présente en continue depuis le début des années 1950. Elle a également été très active à la fin des années 1980 pour faire en sorte que l’environnement de l’Antarctique soit préservé et que le continent soit considéré comme une réserve naturelle à usage scientifique international.

C’est pour cette raison que pour les sénateurs français, l’année polaire internationale sera un événement majeur pour la science et pour nos concitoyens. Le Sénat français organisera un événement important à Paris à l’occasion de son ouverture le 1er mars 2007 et j’espère vivement que plusieurs d’entre vous pourront être présents.
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L’année polaire internationale sera placée sous le signe de la coopération scientifique internationale. Comme la précédente en 1957-1958, il est essentiel que la mobilisation du monde scientifique se fasse dans un cadre d’ouverture et d’échange.
Je crois que l’année polaire 2007-2008 se place dans un contexte qui rend plus urgente encore cette coopération internationale. Le contexte est en effet profondément différent de celui qui prévalait il y a 50 ans :
- Guerre froide et revendications territoriales nationales sur l’Antarctique hier, mondialisation et émergence de nouveaux acteurs mais aussi de nouveaux risques aujourd’hui,
- Europe quasiment inexistante hier, Europe réunifiée et organisée dans une coopération toujours plus étroite aujourd’hui.

Cela veut dire pour moi, qu’au niveau international, d’une part, malgré les tentations obscurantistes et malgré les rivalités nationales, la recherche en milieu polaire doit continuer à incarner le caractère unitaire et pacifique de la démarche scientifique mais aussi la possibilité de faire progresser l’humanité.

Au niveau européen, d’autre part, 50 ans après le début de construction d’un ensemble supranational grâce au traité de Rome, alors même que la recherche est une des politiques les plus importantes de l’Union pour l’avenir, il me semble fondamental que la coordination des recherches menées aux pôles se renforce.

A cet égard, la base Concordia est exemplaire.

L’Europe était engagée dans les programmes internationaux de recherche climatologique et plus particulièrement paléo-climatologique par utilisation des carottages glaciaires. Ce projet nécessitait la mise en place d’un camp d’été temporaire au cêur du continent sur le site de forage : le dôme C.
Cependant, c’était une formidable opportunité de mettre en place comme d’autres grandes nations, notamment les êtats-Unis et la Russie, une base permanente sur le plateau Antarctique dans une situation particulièrement intéressante.
Cette ambition n’a pu se réaliser que par la conjonction des efforts et des compétences de deux nations européennes, la France et l’Italie, faisant de Concordia la première base « européenne » de l’Antarctique et montrant la voie à d’autres coopérations.
Si le passé de la base est une coopération exemplaire, son futur le sera également. Alors qu’un premier hivernage franco-italien s’est déroulé avec succès et que le second vient de commencer, le troisième hivernage verra peut-être se joindre aux deux nations fondatrices d’autres nations européennes. C’est personnellement ce que je souhaite.
Je le souhaite à la fois par volonté de coopération scientifique mais aussi par souci des deniers publics. La logistique est trop importante en Antarctique pour que l’on néglige de la mutualiser.
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Cette base Concordia dont vous aller découvrir les images tout à l’heure et entendre les hivernants, je l’ai découverte pour ma part fin décembre 2005 lors de ma mission en Antarctique.
Elle est située à équidistance de la base de banquise Mario Zuchelli-Terra Nova sur la mer de Ross et la base française permanente de Dumont d’Urville en Terre Adélie, soit à 1.200 km à l’intérieur du continent. Elle est située à 75°06′Sud et 123°21′ Est, à 3.233 m d’altitude.
La base Concordia est composée de deux bâtiments cylindriques reliés par un tunnel comprenant 1.500 m2 de surface habitable au total sur deux fois trois niveaux. Le premier bâtiment est conçu pour les activités « calmes » (de bas en haut) : l’hôpital et la salle de télécommunications, les chambres et les laboratoires. Le second est réservé aux activités « bruyantes » (de bas en haut) : le local technique, les magasins, la salle de sport et la salle vidéo, et la cuisine, le restaurant et la bibliothèque.
La base a été construite avec les technologies les plus pointues en matière de recyclage des eaux et des déchets. Cette partie de la station a d’ailleurs été conçue avec l’ESA, l’Agence spatiale européenne. Il y a en effet beaucoup de similitude entre une base polaire, une station spatiale ou une base sur la Lune. La structure doit être transparente par rapport à l’environnement aussi bien pour des raisons écologiques que scientifiques.
La station permet d’accueillir seize personnes en hiver dont neuf scientifiques, quatre techniciens dédiés à la logistique de la station, un ingénieur, un médecin et un cuisinier. 32 personnes peuvent être accueillies en été.
La base a représenté un investissement d’environ 35 millions d’euros.
Les conditions climatiques y sont extrêmes comme dans toutes les stations de l’intérieur du continent :
.Température moyenne de l’air : – 50,8°C,
. Température minimale de l’air : – 84,4 °C,
. Vitesse maximale du vent : 17 m/s (33 nêuds),
. Niveau annuel des précipitations (neige) : 2 à 10 cm.
La base Concordia ouvre de nouvelles perspectives aux chercheurs français et italiens dans au moins deux domaines : l’observation de l’espace et la préparation des missions spatiales.
L’observation de l’espace tout d’abord parce que les études réalisées pour le moment sur le site de Concordia montrent une très grande pureté et une très grande stabilité du ciel et de la température, en faisant un site réellement exceptionnel. A ces conditions s’ajoutent la longueur de la nuit polaire qui peut permettre des observations en continue.
En matière de préparation des missions spatiales, l’isolement et le confinement font de la base un excellent site d’expérimentation du matériel comme de l’impact sur les organismes humains et les relations sociales pour préparer des missions de longues durées.
Enfin, la base de Concordia a aussi été un défi technologique en matière de logistique. Une caravane chenillée a été mise au point qui permet de transporter du matériel lourd en quantité importante entre la côte et la base à un coût deux fois plus faible que l’avion et avec une prévisibilité et une sûreté plus importante que les liaisons aériennes. Ce « raid » est assuré trois fois par an durant l’été et complète très utilement les relations aériennes qui permettent les transports de passagers ou de matériels légers.
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En conclusion, je souhaite vous redire combien vos travaux sont importants pour vos concitoyens et au cêur des grandes questions d’aujourd’hui.
La coopération internationale très forte qui est l’un des aspects marquants de la recherche en milieu polaire est elle aussi un signe politique à la veille de l’année polaire internationale qui permettra de mettre la science à l’honneur et de la rendre plus visible du grand public.
Enfin, comme certains l’ont expérimenté et d’autres vont le découvrir maintenant au contact des hivernants de Concordia, cette base est une très belle réalisation européenne et un formidable outil au service des chercheurs du XXIe siècle. La découvrir au cêur de l’Antarctique a été pour moi une grande fierté.
Je vous remercie de votre attention.