Je profite de l’arrêt de la session parlementaire pour me reposer un peu, passer un moment en famille et lire sur les pôles.
J’ai acheté le numéro de juillet août du magazine La Recherche. Il est largement consacré au Climat. Le pôle Nord est particulièrement étudié – je regrette d’ailleurs qu’il n’y ait pas plus d’informations sur les évolutions au Sud -
J’ai été particulièrement intéressé par l’article de Jean-Claude Gascard, directeur de recheche du CNRS, professeur à l’Université Pierre-et-Marie-Curie à Paris et coordinateur du programme européen Damocles pour le “Développement de la modélisation et des capactités d’observation de l’Arctique pour des études environnementales à long terme”.
Il y fait le point sur les connaissances et l’évolution probable de l’océan arctique et de la banquise. Cet océan en pleine mutation se révèle être un des moins connus du monde. On continue de savoir trop peu de chose des mécanismes de formation de la banquise et de son évolution. Si tous les modèles utilisés prédisent sa disparition l’été d’ici à 2050, il y a pourtant de très grandes incertitudes. Comment bien mesurer la variation de la surface ? la variation du volume ? La glace a-t-elle disparue ou s’est-elle déplacée ? Quelles sont les causes : modification du flux d’eau atlantique, de la pression atmosphérique, le réchauffement climatique ? Y aura-t-il des effets de seuil ?
Toutes ces questions ont évidemment une importantce cruciale puisqu’il faut prévoir les conséquences sur le climat, la faune et évidemment les hommes qui vivent dans l’Arctique.
Comprendre ces phénomènes est tout l’enjeu du projet Damocles. En réunissant les observations sur la banquise et au fond des océans, il sera possible de réduire les incertitudes des modèles et de mieux prédire les évolutions. Ce projet financé par le 6e PCRD est un bon exemple de ce qu’il est possible de faire en fédérant les énergies européennes. A partir de cette mise en commun, il est aussi possible de travailler sur une base solide avec les Etats-Unis (programme Search) et la Russie.
Parmi les conséquences potentielles, l’une des plus controversées est l’évolution du Gulf Stream. L’article de Detlef Quadfasel, chercheur à l’université de Hambourg, et l’entretien avec Edouard Bard, professeur au Collège de France, permettent de faire le point. D’abord les deux chercheurs expliquent que le scénario catastrophique d’un arrêt n’est pas réaliste à brève échéance. Il faut plutôt tabler sur un ralentissement progressif.
Or, en la matière, les incertitudes sont très grandes. L’équipe de Harry Bryden de l’université de Southampton a estimé que la réduction aurait été de 30 % au cours des cinquantes dernières années. Ces données se fondent sur l’analyse de cinq instantannés (1957, 1981, 1992, 1998 et 2004) en une seule section de latitude. Est-ce suffisant pour avoir une certitude ? sans doute pas.
Néanmoins comme le souligne Edouard Bard, tous les modèles prédisent ce ralentissement mais c’est dans des proportions allant de 10 à 50 % d’ici à 2150. Par le passé, notamment il y a 16.000 ans une forte injection d’eau douce a provoqué un changement brutal. Cela peut-il se reproduire ? La réponse est sans doute dans l’importance de l’action de l’homme.
Je vois dans ces débats et ces interrogations d’immenses champs pour la recherche. Je suis convaincu que des discours catastrophistes mal fondés scientifiquement sur la banquise et le Gulf Stream sont dangereux car ils ne peuvent qu’empêcher une véritable prise de conscience politique des changements en cours. Une peur irraisonnée n’est pas un bon moteur pour prendre de bonnes décisions.
Sur le sujet du climat et de l’interaction avec les océans, il y a aussi un très intéressant dossier dans le dernier numéro du Journal du CNRS. C’est très complémentaire du dossier de La Recherche.
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